Mon hypothèse : Elle se base
sur une méta-analyse subjective de la situation.
- Le public, qui vit dans un monde sécurisé (c'est à
dire qui n'est ni en guerre, ni en famine), semble aimer les
films d'horreur; il a besoin - ou envie - de se faire peur. Il
ralentit pour regarder les accidents de voiture sur la
route (causant des embouteillages). Il regarde les morts
à la télévision et dans les journaux (tout en se cachant
les yeux et disant que c'est horrible). Même les enfants
sont saturés de morts dans leurs dessins animés. Le
public a besoin de sa dose quotidienne de peur et
d'horreur.
Ce public achète des journaux, regarde la télévision et
écoute la radio, qui parlent de morts, de blessés
graves, d'accidents... Mais particulièrement d'accidents
spectaculaires et distants de son quotidien.
- Les médias, qui ont besoin de vendre leur support
médiatique pour gagner leur vie, offrent aux gens leur
dose d'horreur et de peur. Cela rapporte de l'argent.
Même beaucoup d'argent. Mais ils doivent éviter de faire
peur aux gens avec des choses qui leur sont trop
proches: alors on va trouver des chiens qui ne sont pas
très fréquents et à qui la majorité du public trouve une
sale gueule. En fait les chiens n'ont pas une sale
gueule, mais ils sont associés à des groupes marginalisés
dont le public a peur: des punks, des ados errants, des
jeunes - sans travail - organisés en gang, etc., en fait
tout ce qui sort des bonnes convenances, des conventions
des honnêtes gens. Les médias ont trouvé une liste de
races de chiens: des pitbulls, des amstaffs, des
rottweilers et d'autres chiens inconnus.
Et ça marche. Les gens adorent. Ils achètent. Dès qu'un
Pit mord, il fait la 'une' des journaux et du journal
télévisé; et les gens achètent, regardent les images
encore et encore. C'est une mine d'or pour les médias.
- A un moment, la machine s'emballe. Les gens qui
jouaient à se faire peur commencent à y croire, et à
avoir vraiment peur. Les médias aiment ça, ils
s'enrichissent d'avantage.
- Les gens qui ont vraiment peur demandent à être
sécurisés. Mais comment peut-on être sécurisé d'une
croyance, d'une illusion?
- C'est à ce moment que le public interpelle les
responsables de leur sécurité : le politique :
bourgmestres, députés, sénateurs, ministres...
Le politique répond à la demande du public. Bien
entendu, il doit faire quelque chose sinon il ne répond
plus à la demande du public et n'est plus réélu. Le
politique doit garder son job, son gagne-pain, son siège. Donc il
cherche une solution pour réduire le problème.
Mais le problème n'est pas le nombre de morsures de
chiens ni le nombre de tués par an mais l'illusion
d'insécurité.
Le politique, intelligent ou démagogique, a trouvé une
réponse facile et bon marché. Il suffit d'interdire les
chiens médiatisés. Dès lors, on n'en parlera plus dans
les médias, les gens ne se plaindront plus, et tout
rentrera dans l'ordre.
Pour faire bonne mesure, le politique prend contact avec
les spécialistes; les experts remettent leurs rapports
que le politique place dans la poubelle après survol
superficiel (sans le lire). Les rapports ne donnent pas
de solution au problème de l'insécurité mais bien pour
réduire le nombre de morsures de chiens dans la
population (surtout dans les familles).
Le politique ne s'embarrasse pas d'étude épidémiologique
(fréquence de morsure dans la population) avant la
promulgation de lois raciales (racistes) et ne cherche
pas non plus à savoir l'effet de ces lois sur la santé
et la sécurité publiques. Non, puisque ce n'est pas son
problème. Son vrai problème, c'est l'illusion
d'insécurité que le public s'est créée par sa faim
d'horreurs.
- Ce que personne n'avait prévu - et c'est vraiment
amusant - c'est que les minorités, qui possèdent ces
chiens bannis, se trouvent valorisées par l'image
(terrorisante) de leur
chien. Le Pitbull fait peur? "Chouette, je vais faire
peur si j'ai un Pitbull", se dit le minus qui joue au
macho. Et, d'autre part, le soi-disant ami des chiens, qui
affirme qu'aucun chien ne naît méchant mais le devient
par l'effet de son maître, acquiert un Pitbull pour
montrer à tous que le Pitbull n'est pas un chien
méchant.
Et, du coup, grâce au coup de publicité des lois
antiraciales, on vend / achète 10 fois plus de races
bannies.
Le public voit donc 10 fois plus de chiens soi-disant
dangereux dans la rue. L'illusion d'insécurité
s'accroît.
Les médias parlent encore plus des chiens bannis. Les médias
vendent encore plus. les médias se font concurrence.
C'est à qui en parlera le plus. Le public achète plus. Le public dépense
encore plus d'argent pour s'acheter de l'insécurité.
Le politique fait "plus de la même chose" (toujours inefficace) : il
renforce les lois antiraciales et demande d'avoir au
plus vite des experts pour évaluer les chiens
potentiellement dangereux.
- Qui va jouer expert ? Les vétérinaires, les
éducateurs, des experts spécialement formés...? Mais qui
va les former ? En Suisse il y a 5 ans, en France
aujourd'hui, en Belgique demain, on a formé des
vétérinaires pour réaliser des expertises sur des chiens
possiblement dangereux.
Mais qui va les payer ? Qui va payer l'addition ? Le
Ministère de la Santé, de la Sécurité Publique, de
l'Agriculture, de la Justice, les bourgmestres...? On ne
sait pas encore. Ce qui est certain, c'est que, en fin
de compte, c'est le peuple qui payera la facture. Et
quelque part, c'est logique, puisque c'est bien le
peuple - le public - qui a créé l'épidémie par sa soif
d'horreur. Les médias, eux, ne prendront bien entendu
pas la responsabilité dans l'amplification du phénomène;
eux, ils encaissent les sous, c'est tout. Le politique a
fait ce qu'il fallait pour être réélu. On se trouve à la
fin avec des lois en plus, de l'administration en plus.
Pour pas grand chose, voire pour rien.
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Alors, que reste-t-il de toute cette histoire ? Et
que faire ?
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Il reste les faits, le nombre important de
morsures de chiens: la plupart de ces morsures sont peu
dangereuses, mais elles existent néanmoins.
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Il existe bien un problème de santé
publique. La plupart des morsures se font dans la
maison, par un chien bien connu des personnes: leur
chien, celui de la famille, des voisins...
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Il existe aussi un problème de sécurité
publique: des chiens mordent dans la rue, mais moins
que des chiens qui mordent à la maison... Ces chiens
doivent être sous contrôle de leur propriétaire. Il y a
des lois qui obligent à ce contrôle. Il n'est pas utile
de créer de nouvelles lois mais il est important de
faire respecter les lois actuelles. (A quoi servirait de
créer de nouvelles lois qui ne seront pas mieux
respecter que les lois actuelles?)
- On peut réduire le nombre de morsures de chiens
facilement.
Il suffit de prendre conscience qu'un chien, ça mord,
même si on l'aime et s'il nous aime.
C'est incroyable le nombre de gens qui croient qu'aimer
empêche l'agression. Et c'est aussi incroyable le nombre
de gens qui confondent agression et méchanceté (et
dominance).
Dès qu'on se rend compte qu'un chien peut mordre, on
prend les mesures simples pour éviter les morsures.
- On apprend à détecter les signes avertisseurs de
morsures
- On apprend à décoder le langage postural du
chien et ses mimiques
- On ne laisse jamais un enfant seul avec un chien
- On respecte le chien et on ne l'utilise pas
comme un jouet dont on peut user et abuser
(savez-vous que 80% des chiens manquent d'activité?
C'est déjà un manque de respect, une maltraitance
passive).
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